- Vu les autres pièces du dossier ;
- Vu le code de la santé publique ;
- Vu le code général des impôts ;
- Vu le code de justice administrative ;
- Vu l'ordonnance du 17 juillet 2007 du président du tribunal administratif ordonnant une expertise et désignant le docteur en qualité d'expert ;
- Vu le rapport d'expertise déposé au greffe du tribunal administratif le 19 décembre 2011 ;
- Vu l'ordonnance du 16 février 2012 du président du tribunal administratif liquidant et taxant les frais et honoraires de l'expertise à la somme de 1.797,22 euros ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 2013 ; -le rapport de Mme P , rapporteur, - les conclusions de Mme L , rapporteur public, - et les observations de Me D avocat, pour le centre hospitalier régional universitaire de Tours;
- Considérant que le 30 septembre 2003, Mme l démarrait une septième grossesse ;
- qu'en raison du passé gynécologique de l'intéressée et de ses problèmes de santé, cette grossesse a été particulièrement suivie et s'est déroulée sans incident ;
- que, le 24 mai 2004, Mme L a été hospitalisée en urgence au centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Tours alors qu'elle présentait des contractions ;
- qu'il a été décidé de déclencher l'accouchement le 27 mai 2004 à 15 heures 30 ; qu'à 23 heures 15, alors que le rythme cardiaque de l'enfant avait connu une succession d'ébauches de ralentissements et qu'une latérocidence de la main et du cordon avait été constatée plus tôt dans la soirée, les efforts de poussée de Mme L n'avaient pas permis la naissance de l'enfant; qu'il était alors constaté une absence d'engagement et une altération du rythme cardiaque ;
- que le médecin de garde a alors tenté de procéder à une rotation de la tête du fœtus par manœuvre manuelle sans succès;
- qu'il a constaté une procidence du cordon ;
- qu'à 23h32, il a tenté d'extraire l'enfant par forceps sans succès et a décidé de procéder à une césarienne ;
- que Mme L a été transférée au bloc opératoire à 23 heures 45 ;
- que Touati est né à 23
TRIBUNAL ADMINISTRATIF D'ORLÉANS RÉPUBLIQUE FRANÇAISE N° 1204202 M. et Mme A M.p- . L M. AJ2 L: Mlle F L Mme P: Rapporteur L AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Le Tribunal administratif d'Orléans, (4ème chambre) Mme L Rapporteur public Audience du 14 novembre 2013 Lecture du 28 novembre 2013 60-02-01-01-01-01-03 Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2012, présentée pour M. et Mme A Lazreug, M. D L ..:t M. et Mlle Abl . et F L: représentés par leurs parents, demeurant ' rue . à par Me Yamba avocat ; les réquérants demandent au tribunal :
1) de condamner le centre hospitalier universitaire régional de Tours à leur verser, en réparation des préjudices subis du fait des fautes commises par cet établissement lors de l'accouchement de : 30.000 euros à M. et Mme A 30.000 euros à M. Ab ( L 15.000 euros à M. D. L L et à Mlle F.
2) de condamner le centre hospitalier universitaire régional de Tours au paiement des entiers dépens ;
3) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire régional de Tours la somme de -- euros au titre de l'article E: ordonnée par le Tribunal de Grande Instance d'Orléans que la présence du médecin au cours du travail aurait permis de discuter de l'indication d'une césarienne à différents moments du travail notamment à 19 heures 50 et en tout état de cause à 23 heures 15 ; que le médecin de garde n'a finalement été contacté qu'à 23 heures 15 alors que la dilatation du col de l'intéressée était complète depuis une heure ; Considérant qu'alors que l'état de santé de Mme L impliquait une surveillance accrue, la sage femme n'a appelé le médecin de garde à ni à 19 heures 50, ni à 22 heures 50 le privant de la possibilité d'évaluer globalement le déroulement de l'accouchement de Mme L ; que cette absence d'appel l'a également privé de la possibilité de choisir de procéder à une césarienne plus rapidement, choix qui selon les docteurs R et P aurait été vraisemblable ; que cette absence d'appel est constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité du CHRU de Tours en application de l'article L.1142-1 du code de la santé publique ; .Sur le lien de causalité : Considérant que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu ; que la réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; Considérant qu'il résulte de l'instruction que T est né en état de mort cérébral et présentait rine anoxie cérébrale ; qu'il ressort notamment des rapports d'expertise des docteurs. Considérant que le 31 mai 2005, M. et Mme L ont engagé une action pénale devant le Tribunal de grande instance de Tours ; que deux expertises ont été successivement ordonnées par le juge d'instruction ; que le tribunal de grande instance, comme la Cour d'appel d'Orléans ont considéré qu'aucune faute pénale n'était caractérisée; que M. et Mme L ; ont saisi le tribunal d'une requête en référé expertise le 29 mai 2007 ; qu'ils ont adressé une demande préalable d'indemnisation au CHRU de Tours le 22 août 2012 ; que par la présente requête, M. et Mme L :agissant en leur nom et en celui de leurs deux enfants mineurs , Ab et F et M. D. leur fils majeur, sollicitent la condamnation du CHRU de Tours à les indemniser du préjudice moral consécutif pour eux au décès de leur fils et frère ; N° 1204202 4 0 Sur la responsabilité : 3. Considérant que M. et Mme L soutiennent que la responsabilité du CHRU de Tours est engagée pour faute; que le CHRU aurait commis deux fautes, la première résultant d'un défaut de circulation des informations au sein de l'équipe médicale et d'une décision tardive de procéder à une césarienne, la seconde résultant d'un aménagement défectueux des locaux ; En ce qui concerne la configuration des locaux :
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la salle de naissance et le bloc opératoire n'étaient pas contigus, mais distants de 80 mètres ; que le délai qui s'est écoulé entre la décision de pratiquer une césarienne prise à 23 heures 32 et l'extraction de T qui a eu lieu à 23 heures 54 est de 22 minutes ; que le transfert de Mme L de la salle de travail au bloc opératoire a pris 10 minutes ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise des docteurs L et R ordonnée par le juge d'instruction, que la situation de la maternité du CHRU était conforme au décret applicable n°98-899 du 9 octobre 1988 ; que le service de gynécologie obstétrique avait fait l'objet d'une inspection par l'Agence régionale d'hospitalisation du Centre le 18 mars 2004, soit deux mois avant l'accouchement de Mme L, qui n'avait retenu aucune anomalie quant à l'installation, l'organisation et les modalités de fonctionnement • R et P et du docteur L que si la sage femme avait appelé le médecin de garde à 19 heures 50 ou encore à 22 heures 50, celui-ci aurait du service; que si l'aménagement des locaux n'était pas optimum, aux dires de l'expert désigné par le tribunal, il n'était ni défectueux, ni contraire aux normes en vigueur ; qu'en outre, le délai qui s'est écoulé entre la décision de pratiquer une césarienne •et sa réalisation a été de 22 minutes; que le délai optimum est compris entre 15 et 20 minutes; qu'en l'espèce l'organisation des locaux n'est en tout état de cause pas constitutive d'un aménagement défectueux susceptible d'engager la responsabilité du CHRU; En ce qui concerne le défaut de circulation des informations : 7
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'accouchement de Mme L a été déclenché à 15 heures 30; que le travail a débuté à 17 heures; qu'à 18 heures 45 les membranes ont été rompues par la sage femme ; qu'à 19 heures 50, celle-ci a constaté une latérocidence de la main et du cordon; qu'entre 20 heures et 20 heures 15, deux épisodes de ralentissement du rythme cardiaque du fœtus ont été notés; qu'à 22 heures 15, la dilatation du col était complète; que jusqu'à 22 heures 35 le rythme cardiaque de l'enfant est demeuré stable avec une succession d'ébauches de ralentissements; que la sage femme a procédé à une tentative de saturomètrie à 22 heures 50; qu'à 23 heures 15, il a été constaté par l'interne présent une absence d'engagement malgré les efforts de poussée de Mme L et une altération du rythme cardiaque de l'enfant; que le médecin de garde a alors été appelé auprès de la requérante; qu'il a tenté une rotation de la tête du fœtus par manœuvres manuelles sans succès ; qu'il a constaté une procidence du cordon nécessitant une naissance rapide de l'enfant; qu'à 22 heures 32, la tentative d'extraction par les forceps ayant échoué, le praticien a alors pris la décision de procéder à une césarienne; qu'à 23 heures 35, Mme L a quitté la salle de travail pour le bloc opératoire; qu'elle a été installée dans le bloc à 23 heures 45 et anesthésiée à 23 heures 49 ; que T est né à 23 heures 54; Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise ordonnée par le tribunal ainsi que de celle réalisée par les docteurs R : et P ordonnée par le juge d'instruction, que la sage femme aurait dû appeler le médecin de garde aux côtés de la requérante à 19 heures 50 lorsque la latérocidence de la main et du cordon a été constatée ; que le médecin aurait alors eu une vision d'ensemble de la situation de Mme L _ et aurait pu prendre la décision de procéder à une césarienne; qu'il résulte également de l'instruction, et plus particulièrement du rapport d'expertise des 8. Article 8 : Le présent jugement sera notifié à M. et Mme A • l à 9. M. D L, à la caisse primaire d'assurance maladie d'Indre-et-Loire, au centre hospitalier régional universitaire de Tours et à M. • L , expert. 10. Délibéré après l'audience du 14 novembre 2013 à laquelle siégeaient 11. Mme B M.G 12. Mme P; 13. présidente , 14. premier conseiller, 15. , conseiller. 16. Le rapporteur, Laff, 17. Lu en audience publique le 28 novembre 2013. 18. Mélanie PALIS DE KONINCK 19. Ghislaine BOROT 20. La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit comll}un contre les parties privées de pourvoir à 1'exécution du présent jugement. 21. Note pu décider de pratiquer une césarienne plus précocement ce qui aurait augmenté les chances de l'enfant de naître indemne d'anoxie cérébrale et de vivre ; que les docteurs R et P indiquent clairement que si la sage femme avait appelé le médecin de garde a 19 h 50 il est «vraisemblable » qu'il aurait été décidé de procéder à une césarienne qui aurait «vraisemblablement» permis d'éviter la survenue d'une anoxo-ischémie; que, dans ces conditions, la faute commise a eu pour conséquence une perte de chance pour le fils de M. et Mme L de naître indemne de séquelles cérébrales qui doit tre fixée à 50%; Sur les préjudices
7. Considérant que M. et Mme L, en leur nom et en celui de leurs deux enfants mineurs et M. L sollicitent l'indemnisation de leur préjudice propre qui a résulté pour eux du décès de leur fils et frère; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice d'affection subi par la famille de Touati en l'évaluant, eu égard à la chance perdue, à 20.000 euros pour M. et Mme L, à 2.500 euros pour M. D L, à 2.500 euros pour M. A L et à 2.500 euros pour Mlle F L; qu'il y a lieu de condamner le CHRU de Tours à verser ces sommes à M. et Mme L et M. D L en réparation de leur préjudice propre et de celui de leur deux enfantsmineurs ; Sur les dépens : Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge du CHRU de Tours la somme de 35 euros acquittée par M. et Mme L et M. D L au titre de la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts;
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais d'expertise, tels que liquidés et taxés par l'ordonnance du président du tribunal administratif du 16 février 2012 à la somme de 1.797,22 euros, à la charge définitive du CHRU de Tours; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative : 7. Considérant, d'une part, que les dispositions susvisées font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme L, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, la somme que le CHRU de Tours demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; 8. Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHRU de Tours la somme de 1.000 euros au titre des frais exposés M. et Mme L et M. D L et non compris dans les dépens ; DECIDE : Article 1er : Le centre hospitalier régional universitaire de Tours est condamné à verser à M. et Mme A L une somme de 20.000 euros (vingt mille euros) en réparation de leur préjudice propre et une somme de 5.000 euros (cinq mille euros) en réparation des préjudices subis par leurs deux enfants mineurs, A et F, dont ils sont les représentants légaux. Article 2 : Le centre hospitalier régional universitaire de Tours est condamné à verser à M. D L une somme de 2.500 euros (deux mille cinq cent euros). Article 3 : Les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 1.797,22 euros (mille sept cent quatre-vingt dix sept euros et vingt-deux centimes) sont mis à la charge définitive du centre hospitalier régional universitaire de Tours. Article 4 : Il est mis à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Tours la somme de 35 euros (trente cinq euros) acquittée par M. et Mme A • L et M. D Lan:.erut, ll..at]- lJ.lic.atU:m..dc..l: w...icl?. l6.1S IR Q 4R. t. sim.%s'ill.t,.i,tz; t:k,s cbl >ns. Article 5 : Le centre hospitalier régional universitaire de Tours versera la somme de 1.000 euros (mille euros) à M. et Mme A L et M. D L au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions présentées par M. et Mme A L: et M. D , L est rejeté. Article 7 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier régional universitaire de Tours au titre des dépens et sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.