C 'était ma reine, je l'aimais comme un fou : cette phrase en dit long sur la relation qu'entretenait l'accusé, Jean-Claude Riant, avec la victime Ginette Guichard. A l'expert-psychiatre qui l'interrogeait, l'homme, âgé aujourd'hui de 68 ans, avait décrit sans détour ce lien amoureux. L'expert y voit le motif du passage à l'acte qui, le 28 février 2012, a conduit à la mort de sa compagne, poignardée de 26 coups de couteau.
La veille du meurtre, malade et affaiblie, la victime avait demandé à son compagnon de quitter son domicile. Le lendemain, alors qu'il venait chez elle récupérer des affaires, Jean-Claude Riant a tenté en vain une ultime réconciliation. « Il a eu l'impression d'être jeté comme un chiffon sale, indique l'expert. Alors que, selon lui, une semaine plus tôt, elle voulait se marier avec lui. Cela lui était insupportable. »C'est cette « blessure narcissique »qui, selon l'expert, expliquerait le déchaînement de violence mortel.
Les explications données par l'accusé sont d'ailleurs cohérentes avec ce point de vue. « Ginette m'a dit : " Demain, tu prends ton cyclo et tu te tires ! ". J'étais contrarié, énervé », commente-t-il. L'homme admet sans difficulté avoir commencé par tenter d'étrangler sa victime avant de la poignarder de 26 coups avec un couteau habituellement utilisé pour découper le gigot. L'arme est impressionnante et l'avocat général, Bruno Albisetti, n'a pas manqué de souligner la longueur de la lame dans ses réquisitions.
Il a mimé les gestes à l'aide d'une règle de même dimension pour mieux faire prendre conscience aux jurés de la détermination avec laquelle les coups ont été portés par l'accusé.
" Sans haine mais sans faiblesse "
« Ce sont des coups déterminés, dans toutes les parties du corps, précisait l'avocat général. La victime a cherché à se défendre, elle a mis son bras pour se protéger. Certains de ces coups ont été portés quasiment jusqu'à la garde du couteau. Onze d'entre eux ont atteint des parties vitales, ce qui caractérise bien la volonté de tuer. Il ne peut pas en être autrement. »L'avocat général a demandé aux jurés de juger Jean-Claude Riant « sans haine, mais sans faiblesse »avant de requérir une peine de vingt ans de réclusion criminelle.
La tâche de Me Germain Yamba, l'avocat de l'accusé, n'était donc pas simple. Il a plaidé avec fougue le caractère passionnel et irrationnel de ce crime. « Il est incapable d'expliquer son geste, indiquait l'avocat. C'est un acte animé par un amour blessé. » Le défenseur s'est élevé avec force contre la peine requise par l'avocat général. « Vingt ans de réclusion, à son âge, c'est la perpétuité, s'emportait-il. Le condamner à cette peine, c'est lui imposer de mourir en prison. »
Après trois heures de délibéré, la cour d'assises a condamné Jean-Claude Riant à seize ans de réclusion criminelle.
Caroline Devos