L'ancien espoir de la boxe thaï mène un nouveau combat.
Le 15 avril 2009, Ryad Ghaoui essuie un tir policier qui le rendra paraplégique. Sans nul doute une étape capitale de la biographie romancée qu’il prépare.
Je n'avais pas à me trouver sur ce parking cette nuit-là ! Sous-entendu, à avoir trempé dans un trafic de stupéfiants.
Ryad Ghaoui, 30 ans aujourd'hui, reconnaît qu'il a franchi la ligne. Il a d'ailleurs été condamné pour ça à dix-huit mois de prison avec sursis. Non, ce qu'il n'accepte pas, c'est, dit-il, l'injustice de la situation. « Les flics font leur boulot, c'est normal, sinon c'est l'anarchie. J'accepte la défaite, mais accepter l'injustice, c'est différent. »Comme se retrouver en fauteuil roulant parce qu'on lui a tiré dans le dos, sans raison valable. C'est sa version.
" Je pensais que le handicap serait mon combat "
Pour la première fois depuis huit ans, il a pu la défendre devant un juge d'instruction, lors d'une confrontation avec l'un des policiers présents ce fameux 15 avril 2009, à 1 h 20 du matin.
C'était la raison de sa présence à Tours ces derniers jours, une ville qu'il a quittée depuis des années. « J'étais devenu infréquentable. Tout ce que j'avais fait de positif a été effacé par cette balle. Mes propres entraîneurs de boxe m'ont tourné le dos [… ] Sauf un, Tonio. »
L'ancien espoir de la boxe thaï se souvient. Du Maryse-Bastié de son enfance. De la joie qui régnait dans le quartier. De l'éducation, stricte. Du départ de son père, à l'adolescence. Du rôle d'homme de la famille qu'il a voulu assumer. Et puis du moment où « ça a basculé ». Malgré la boxe qui le structure, malgré une mère très à cheval sur les études et l'éducation.
Me Germain Yamba acquiesce. Lui qui l'a connu tout petit. Lui qui a donné des cours à ses sœurs. Lui qui le défend aujourd'hui, avec la double casquette de « grand frère » et d'avocat.
Malgré les jalons, pourtant, le désormais adulte cherche « à faire de l'argent ». « Pas pour faire le beau, mais pour les proches. Pour créer quelque chose. » Il avait le sport, il était passionné de commerce (il passera son BTS après « l'affaire »), mais « le trafic est venu s'emboîter là-dedans [… ] Je ne voulais pas dépendre de ma mère, mais qu'elle s'occupe de mes sœurs. »
Un trafic qui le conduira sur le parking de la place Édouard-Peron (Sainte-Radegonde), ce 15 avril 2009 à 1 h 20 du matin, où il prendra une balle dans la moelle épinière. Le laissant paraplégique. « Je pensais que le handicap serait mon combat, mais j'ai compris, avec le recul, que les émotions qui se dégageaient après un " accident ", c'est plus dur à contrôler que le handicap lui-même. »
Pour le petit garçon de Maryse-Bastié, l'exode devient une nécessité. Il quitte la région « pour être dans l'anonymat. »Loin de la Touraine, loin de sa famille, il continue d'avancer : « Je ne vais pas passer du côté obscure parce que j'ai vécu ça. »
L'écriture est pour lui une forme de thérapie, au point qu'il travaille à sa propre autobiographie romancée. Le dernier chapitre sera-t-il consacré au procès(*) qu'il attend depuis des années ?
« Il faut croire en la justice. »
(*) Mis en examen pour violences avec arme sur personne dépositaire de l'autorité publique, Ryad Ghaoui a porté plainte pour violence par une personne dépositaire de l'autorité publique suivie de mutilation permanente ou d'infirmité.
Olivier Brosset